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10 000 lb de sirop d’érable saisies à l’Érablière Gaudreau

Les saisons des sucres se suivent et se ressemblent à l’Érablière Gaudreau de Scotstown. Une première saisie pour l’année 2019 y a été récemment ordonnée par les Producteurs et productrices acéricoles du Québec (PPAQ). Daniel Gaudreau, propriétaire de l’érablière en compagnie de sa conjointe Nathalie Bombardier, qualifie la situation de « vol légal ». Le couple connait des démêlés avec la fédération depuis 2014.

Au total, les huissiers se sont emparés de 3500 conserves de sirop d’érable et de 11 barils de 450 lb. La valeur marchande de ce liquide se situe entre 27 000 $ et 31 000 $, selon sa catégorie (doré, ambré, foncé). L’opération a duré environ trois heures.

L’histoire se répète
Depuis le début du mois d’avril, un gardien de sécurité a été posté à l’Érablière Gaudreau entre 10 h et le moment de fermeture de l’évaporateur. Celui-ci vérifie et quantifie la production, avant d’en faire un rapport à l’intention de la PPAQ. Après un début de saison retardé à cause de la météo, l’établissement a entamé sa production avant d’atteindre son quota, ou contingent, de 16 000 lb fixé par la fédération. C’est donc l’excédent à cette limite qui s’est retrouvé enlevé d’entre les mains de Daniel Gaudreau.

« Se faire voler, c’est ça que je trouve dur », a commenté l’acériculteur qui fait face à des amendes s’élevant à plus de 300 000 $ de la part de la PPAQ. Avant le départ des huissiers, ses étagères contenaient 3500 conserves de sirop d’érable qui venaient d’être cannées manuellement les jours précédents. Cette production en petits contenants était destinée au marché européen, alors que M. Gaudreau a trouvé un partenaire français qui la lui avait achetée. Avec cette nouvelle manière de faire, le producteur de Scotstown pensait pouvoir échapper au cadre réglementaire de la PPAQ, qui autorise la vente directe au consommateur en format de moins de 5 L.

Pas sortis de l’auberge
« Ça me permettait de vivre et de faire manger ma famille en loi », s’imaginait Daniel Gaudreau. « Ils [la PPAQ] en ont personnellement contre nous. Ils empêchent l’érablière de survivre. » Du côté de la fédération, on rappelle que le cas de l’Érablière Gaudreau en est un isolé. Le duo d’acériculteurs de Scotstown fait partie d’une poignée de récalcitrants sur les 7400 entreprises acéricoles de la province.

Hélène Normandin, directrice des communications à la PPAQ, rappelle que ce sont les producteurs et productrices acéricoles eux-mêmes qui se sont dotés d’une réglementation reflétant la volonté collective. Une équipe mobile de la fédération se rend d’ailleurs sur le terrain pour rencontrer certains propriétaires. « On s’est rendu compte il y a quelques années que, souvent, c’était une mauvaise compréhension des règlements et que, quand on arrive sur le terrain, ça se règle à l’amiable et ça se déroule bien. »

Sous enquête depuis plusieurs années, l’Érablière Gaudreau s’est vue imposer une somme de 321 000 $ à rembourser à la PPAQ par la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. Le jugement a été homologué, mais la décision a été portée en appel. La cause sera entendue sur huit jours à la fin du mois à Sherbrooke.

Lors de ses précédentes saisies en 2018, la PPAQ a retrouvé de l’eau dans les barils en provenance de l’Érablière Gaudreau. Comme le dossier est en démarche judiciaire en ce moment, Daniel Gaudreau préfère ne pas s’étendre sur le sujet. « Moi, je peux juste dire que j’ai mis du sirop dans mes barils. »

Joindre les rangs
S’il y en a un qui est plus que familier avec ces déboires, c’est bien le producteur acéricole de Newport, Steve Côté. Après avoir vu son appel être rejeté par la Cour suprême, il a été contraint de prendre entente avec la PPAQ, qui se nommait à l’époque Fédération des producteurs acéricoles du Québec. Bien que confidentielle, l’entente entre les deux parties dépasse les 400 000 $, avait confirmé M. Côté l’automne dernier.

Pour la présente saison 2019, le producteur dit ne pas avoir tout entaillé ses érables. « Depuis le temps des procédures et tout, j’ai des secteurs qui sont à refaire. Les moyens financiers étant limités, on y va mollo. » Avec une partie de sa tubulure à mettre à jour, M. Côté cherche plutôt à vendre le fonds de terre et son contingent de 27 000 entailles à quelqu’un qui pourra l’exploiter complètement.

Le résident de Newport se désole toutefois de la hausse de la valeur des érablières depuis l’établissement du Règlement sur le contingentement dans le sirop d’érable en 2004. « C’est plus vraiment accessible à monsieur Tout-le-Monde. Les prix ont vraiment monté. »

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