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Le Syndicat des Producteurs forestiers du Sud du Québec : Retour sur un conflit entre le Syndicat et l’Association de défense des producteurs forestiers

Foret

André Roy, président du Syndicat des Producteurs forestiers du Sud du Québec, était entouré à gauche de Martin Larrivée, directeur général, et d’André Houle, directeur adjoint à la mise en marché et au transport.

Le 7 février dernier, le Syndicat des producteurs forestiers du Sud du Québec (SPFSQ) rencontrait par Zoom interposé, 87 des leurs dans le Haut Saint-François, lors de leur assemblée de secteur. Au-delà de la lecture du procès-verbal de la dernière réunion et des résultats obtenus depuis 2019, la mise en marché collective du sciage des résineux sapin-épinette a été discutée. L’Association de défense des producteurs forestiers (ADPF), entre autres, ne digérait pas l’obligation de passer par le Syndicat pour vendre ce type de bois.
Rappelons que le Syndicat est l’unique organisme à s’occuper de la mise en marché de toute la production forestière. Il s’agit d’un plan conjoint du même type que celui négocié par les acériculteurs et les producteurs laitiers.
Pour faire suite à un brulot de l’Association qui critiquait vertement le SPBSQ, et qui fut distribué dans plusieurs boîtes postales sur son territoire, il y a quelques semaines, les membres du CA du Syndicat ont répondu de la même façon en publiant un correctif. Une mise en demeure pour empêcher l’Association de poursuivre ces démarches, que le Syndicat qualifie de diffamatoires, et une demande de rétractation ont été adressées à l’Association en même temps. L’abcès devait être crevé pour la bonne marche du plan conjoint de la mise en marché des produits du bois.
Lors de l’assemblée générale spéciale (AGS) des producteurs du Syndicat, tenue en 2017, 76 % des délégués avaient alors voté en faveur d’ajouter le bois de sciage et déroulage de l’épinette et du sapin au plan conjoint. Des producteurs, muselés à la période des questions, et unis par l’ADPF s’y étaient opposés. Ils avaient été rejoints par l’usine Domtar et le Conseil de l’industrie forestière du Québec (CIFQ) pour contester la décision du Syndicat. C’est alors qu’ils avaient déposé devant la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec (RMAAQ) une plainte pour faire suite à la façon dont le SPFSQ aurait limité leur droit de parole lors de cette dernière.
La Régie, après 22 jours de délibération « […] considère que la consultation des propriétaires forestiers par le SPFSQ n’a pas été satisfaisante. Elle n’est pas convaincue de l’adhésion des propriétaires forestiers. », même si l’objectif du Syndicat était, et reste toujours, de négocier les meilleurs prix pour l’ensemble de ses membres.
Lors de l’AGS de 2017, le SPFSQ proposait qu’à partir de 2019, tous les producteurs forestiers, peu importe la quantité de billots qu’ils souhaitaient vendre, pussent en négocier collectivement les conditions tant des points de vue des volumes que du prix et de la qualité. Toutes les usines de bois de sciage sapin-épinette auraient été obligées de se conformer à l’entente. Les membres du CA avaient aussi établi le taux de transport maximum pour tous les bois de sciage. Enfin, ils avaient statué sur le paiement du transport pour tous les types de produits forestiers.
Cependant, les producteurs, lors de cette même AGS ne voulaient pas toucher à la péréquation des prix ni à l’endroit où ce bois serait dirigé ni les contingentements des volumes. Ce dernier point permettait aux producteurs une certaine flexibilité pour bûcher à leur rythme. Ces ajouts ne compromettaient pas le lien qui existait entre eux ni le paiement qui leur était destiné. Le Syndicat maintenait aussi les contributions des exploitants.
Pour faire suite à l’audience de la Régie qui portait sur les principes de base du projet de 2017, une décision finale a été rendue le 8 octobre 2021. « Le règlement modifiant le règlement sur l’exclusivité de la vente des producteurs forestiers du Sud du Québec […] est modifié par le remplacement de l’article 3 en ajoutant un paragraphe 3.1 ». Les articles 5, 6 et 6.1 connaissent aussi des changements. Ces informations sont facilement accessibles sur le site de la Régie en cliquant sur l’adresse suivante : (https://www.rmaaq.gouv.qc.ca/fileadmin/DocuCentre/Decision/2021/12084.pdf). La conclusion suit la page 31 du document.
Il faut comprendre que le mode de mise en marché différait avant 2017, répond Martin Larrivée, directeur général du Syndicat. Dans l’Arbre plus, à l’époque, on affichait le prix minimum du bois de sciage. Les acheteurs devaient s’y conformer, ce qui ne les empêchait pas d’offrir de meilleurs prix à certains.
Deux facteurs ont convaincu, en 2017, le Syndicat « d’inclure une négociation collective des prix, des volumes et de la qualité de ce type de billots avec les usines pour régler cet écart », poursuivait M. Larrivée. Le SPFSQ voulait « partager la prospérité du secteur forestier entre les acteurs de la filière ».
Parmi ces facteurs à corriger, il fallait voir la concurrence entre les acheteurs diminuer au risque de concentrer le pouvoir d’achat entre les mains d’un plus petit nombre de scieries. Et le prix du bois rond vendu par les propriétaires « subissait un grand décrochage ». Le Syndicat a proposé « d’inclure une négociation collective des prix, des volumes et de la qualité avec les usines pour régler cet écart et mieux partager la prospérité du secteur forestier entre les acteurs de la filière. » C’est l’inclusion du bois de sciage épinette-sapin qui a heurté de front les membres de l’ADPF.
Pour l’exemple du « grand décrochage », le Syndicat démontrait qu’entre le prix payé au producteur pour du 8 pieds de sapin-épinette qui était de quelque 200 $ la corde, les scieurs pouvaient le détailler à un prix supérieur à 1 000 $ pour mille pieds de madriers de 2 x 4. Pour sa part, le 12 pieds qui valait quelque 500 $ en 2005 avait chuté au fil des ans. En 2021, les scieries le payaient environ 400 $. Les moulins, eux, obtenaient près de 1 100 $ pour ses 12 pieds de 2 x 4 vendus à l’usine.
En raison de tous ces écarts de prix, le SPFSQ souhaitait organiser une consultation pour définir le bien-fondé de mettre en place un système de marché pour ce type de bois et pour permettre « une mise en marché ordonnée, efficace et équitable pour les propriétaires forestiers du Sud du Québec. »
André Roy, président du Syndicat, disait constater que le système actuel ne permettait pas l’obtention de prix justes de la part des acheteurs de billots d’épinette et de sapin. Ceux-ci tardaient à appliquer les hausses de prix consenties tout en étant très « rapides sur le crayon » pour les baisser dès le moindre soubresaut du marché.
La mécanisation de la récolte, rappelait le président, nécessite une plus grande stabilité des prix pour tous. Les investissements des propriétaires forestiers, des producteurs, des entrepreneurs, des transporteurs, des papetières et des scieries sont si importants que toutes fluctuations à la baisse compromettent les opérations des uns et des autres.
À cette fin, pour la mise en marché collective du bois de sciage du sapin et de l’épinette, le Syndicat souhaitait, lors de l’AGS, l’ajouter à la convention de mise en marché comme moyen d’obtenir la juste valeur pour cette production, accroître l’équité entre les propriétaires forestiers eux-mêmes et équilibrer le rapport de force entre les intervenants pour en arriver à un véritable partenariat régional.
Prochainement, au moyen d’un sondage et de rencontres, le Syndicat veut avoir une image complète de la situation afin d’en arriver à une entente satisfaisante pour tous. Le résultat de cette analyse paraîtra dans l’infolettre du bulletin d’information du Syndicat au début de l’été.
« Cette année, les producteurs seront invités à partager leurs observations et leurs commentaires notamment quant à la mise en marché du bois de sciage sapin-épinette. Les délégations nommées lors des assemblées pourraient éventuellement être invitées à se prononcer sur la mise en marché collective », est-il écrit dans le communiqué du SPFSQ.
Le Syndicat a été fondé en 1962 et le plan conjoint a reçu l’aval de la Régie des marchés agricoles le 28 juillet 1965. Notons que le Plan conjoint couvre tous les bois vendus, et ce, depuis 1994. C’est lors de l’assemblée du 9 novembre 2017 que le CA a tenté d’ajouter au plan conjoint le bois de sciage et de déroulage.

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