En raison de la disposition de ses boiseries, la salle de spectacle offre une acoustique tout à fait exceptionnelle et M. Audet invite les artistes à vivre cette expérience.
Même si l’idée semble un peu «flyée», Jonatan Audet a les pieds bien sur terre. Il sait très bien que l’acquisition du bâtiment centenaire le Town Hall à Gould, dans le Canton de Lingwick, ne se transformera pas en pont d’or. Cela nécessitera des investissements et une bonne dose d’amour. Mais pour lui, il était important de saisir l’opportunité, faire revivre l’édifice. « Je veux le rendre accessible pour moi, mes proches et le public », exprime-t-il avec un brin d’émotion.
Ce lingwickois d’adoption, depuis 1999, vibre littéralement lorsqu’il parle du bâtiment. Il en a fait l’acquisition le 2 septembre 2018, jour de naissance de son père, maintenant décédé. Cela représente une symbolique importante pour le jeune père de famille. Le Town Hall a une vie, une âme perceptible.
Érigé au début du siècle, le bâtiment a servi d’hôtel de ville, de salle paroissiale, de lieu de mariage, de soirées dansantes. Plusieurs doyens de la municipalité ont vu leur couple se former dans l’une de ces soirées. L’édifice a même accueilli une loge de francs-maçons avant d’être vendu à des intérêts privés.
« Il y a de l’énergie ici, tout le monde le sent. Quand on ouvre la porte, nos yeux vont partout, on pousse un soupir de soulagement en entrant ici. On est envahi par un bien-être hors du commun, par la beauté de la place et l’énergie qui l’habite, c’est du positif. On sent qu’il y a du vécu. On sent que l’âme est bonne, qu’on se promène partout, peu importe l’étage sur lequel on est, on sent qu’il s’est passé des événements heureux, qu’il y a eu une communion vraiment à chaque étage. On voit que ça été fait pour accueillir du monde, on le sent. » Pour M. Audet, le bâtiment n’est pas qu’un édifice comprenant un rez-de-chaussée, un premier et second étage, c’est quelque chose de vivant, de tangible. Le coup d’œil est différent à chaque palier. Au rez-de-chaussée apparaît une salle avec deux grandes tables en parallèle, traversées de piliers rejoignant le plafond composé de tôle embossée. Le tout donne accès à la cuisine où trône majestueusement un énorme poêle à bois cuisinière double. M. Audet l’avoue, le poêle à lui seul constitue un centre d’attraction à couper le souffle. Au premier étage s’ouvre une salle de spectacle avec une scène. La disposition de la boiserie offre une acoustique unique prisée par les musiciens. Le deuxième étage, avec de grandes fenêtres donnant sur le pré à l’arrière, offre une luminosité incroyable, inondant la pièce. Cet espace qui accueillait autrefois les francs-maçons peut servir de dortoir pour des artistes qui seraient en résidence, de laisser tomber M. Audet.
Ce dernier a eu l’occasion de visiter à quelques reprises le bâtiment. Il lançait aux propriétaires de l’époque « si vous songez à vendre un jour, faites-moi signe. » Avec le recul, il avoue qu’il n’aurait probablement pas été en mesure d’en faire l’acquisition à cette époque. Toutefois, près de 15 ans plus tard, le signe qu’il n’attendait plus s’est présenté par courriel. Les astres étaient alignés et M. Audet a sauté à pieds joints. « Dans ma tête, fallait que je mette toute l’énergie. Fallait que je fasse tout ce qu’il faut pour y arriver et si je n’y arrive pas, au moins, j’aurai essayé. Ne pas avoir essayé, j’aurais eu des remords, des regrets. » Il avoue avoir eu des moments de questionnements et d’en avoir discuté avec sa conjointe. « Je me disais, je suis-tu fou de vouloir acheter ça ? C’est un puits sans fond, ça demande du temps, de l’énergie. Dans quoi je m’embarque. Finalement, ma conclusion ça été de me dire si je ne l’essaie pas, si je vais jusqu’au bout de cette idée-là, ce rêve-là, il va y avoir quelque chose qui va me manquer dans ma vie. Je vais être passé à côté de quelque chose pis je vais trouver que j’ai été peureux ou manqué de courage. Je me serais tout le temps demandé à côté de quoi je suis passé. »
Vocation
Pour l’instant, M. Audet a une vague idée de la vocation qu’il souhaite donner au bâtiment. « À court terme, c’est de vraiment laisser aller les choses, organiser des événements culturels avec le Centre Oscar-Dhu et autres organismes de la municipalité. En fait, je prête la place aux organismes. Je peux voir c’est quoi les besoins. » À moyen terme, le propriétaire aimerait que le Town Hall soit ouvert tout l’été et à plus long terme toute l’année. M. Audet se dit ouvert aux suggestions et à la collaboration. « Moi, je ne suis pas un tenancier de bar, mais si quelqu’un m’approchait pour dire : on ouvre tu un bar, ça pourrait peut-être m’intéresser de déléguer. » Lui-même artiste, le propriétaire aimerait offrir un lieu de création où les artistes pourraient habiter le temps de faire leurs choses et pourquoi pas clôturer leur passage par un spectacle ?
Le propriétaire se donne encore du temps pour définir la vocation du bâtiment. « Je ne suis pas pressé et je ne suis pas prêt. Il faut que je trouve la façon de faire qui va concilier les étages. Comment concilier l’aménagement de l’espace pour produire tout ce qu’on peut produire ? C’est quoi le meilleur scénario ? » À ce chapitre, M. Audet avance comme hypothèse la création d’un OSBL qui pourrait être maître d’œuvre des activités. Dans la foulée, il mentionne être à la recherche de partenaires, pas nécessairement financiers, mais « des gens qui sont prêts à mettre du temps, du jus de bras. »
Heureux de son acquisition, M. Audet est d’autant plus fier qu’elle s’ajoute à l’offre touristique de Gould notamment avec le Gîte Au Coeur du Hameau et la Ruée vers Gould.