Comment ne pas dire adieu aux rêves

On demeure dans un paradis, mais la vie dans le Haut-Saint-François peut aussi être précaire.

Notre collaborateur, John Mackley, explique bien son propre exemple dans sa contribution à ce numéro.
Son vécu est dramatique et illustre comment la sécurité personnelle peut être perdue. Nous lui avons demandé alors d’écrire plusieurs autres articles sur les multiples éléments de son expérience. Nous avons aussi demandé des contributions parallèles de femmes ayant passé à travers des vécus aussi graves.

En publiant ces histoires, nous espérons mettre la lumière sur des phénomènes domestiques qui ne sont pas rares. L’étude de la Corporation de développement communautaire du Haut-Saint-François en 2024, Justice pour toutes, révèle que notre région avait un taux d’agressions sexuelles 2,6 fois plus haut que la moyenne canadienne en 2022-2023.

En devenant conscient de ces problèmes, et les vécus réels, nous espérons qu’ensemble, on trouvera les meilleures solutions, qu’on apprenne à les éviter, et qu’on appuie celles et ceux qui se trouvent dans ces situations à en sortir, encore mieux si c’est avec l’aide de l’entourage et de la communauté.

Mais l’éloignement de l’entourage est justement un ingrédient clé dans le poison qui peut en résulter. Dans le Haut-Saint-François, on est souvent plus loin, on s’éloigne, on peut même facilement s’isoler.
C’est justement l’attraction romantique d’une belle région de plein air, de campagne, de forêt et de nature sauvage. Aujourd’hui, tout le monde « rêve la nuit d’avoir [s]on petit lopin de terre », comme Mes Aïeux nous chante depuis 20 ans.

Dans le Haut-Saint-François, beaucoup parmi nous ont réalisé ce rêve, un bel accomplissement en soi.
Mais tout rêve, comme tout paradis, peut avoir son cauchemar. « You call someplace paradise / Kiss it goodbye », selon la chanson des Eagles en 1976. « The gist of the song was that when we find something good, we destroy it by our presence », a dit l’auteur Don Henley, dans une entrevue avec la revue Rolling Stone.

Parfois, on pourrait dire la même chose non seulement de l’environnement, mais aussi de couples et de familles.

On achète notre petit lopin de terre dans le magnifique Haut-Saint-François. On s’éloigne. On met tout notre argent dans la construction du beau chalet, dans la rénovation de la vieille maison ou dans le projet agricole. On devient plus autosuffisant, ce qui nous éloigne encore. Avec l’éloignement vient l’isolement. Avec l’isolement et les nouveaux stress financiers viennent les conflits. Avec les conflits mal gérés viennent la toxicité, l’abus, peut-être les agressions, la violence.

Tout d’un coup, le rêve est devenu cauchemar. On ne l’a pas vu venir. Il faut comprendre ce phénomène important pour nos proches qui se trouvent dans ces situations : dans la phase de rêver, tout est beau… la personne, la maison, le p’tit lopin de terre. Dans la phase de défis, de stress, de conflits, on ne sait jamais, et c’est difficile à prévoir.

Le Haut-Saint-François demeure ce qu’on fait avec. Espérons qu’on le traite toujours comme un paradis, et qu’on traite ceux qu’on aime toujours comme les trésors qu’elles et qu’ils sont… le couple, les enfants et la famille comme les rêves qu’ils devraient être.
Espérons que notre série d’articles aidera.

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Scott Stevenson
Originaire du Canton de Hatley, Scott Stevenson est directeur du Journal Le Haut-Saint-François et demeure sur sa ferme à Island Brook depuis 2012.
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