En devenant la première à être certifiée par l’International Dark-Sky Association, la Réserve internationale de ciel étoilé du Mont-Mégantic (RICEMM) a développé une expertise enviable au cours de ses onze années d’existence. C’est ce bagage de connaissances auquel ont fait appel deux conférences internationales portant sur le ciel étoilé et l’éclairage artificiel. La première, au Maroc, vient de se terminer, alors que la seconde débutera dans quelques jours à Salt Lake City aux États-Unis. Deux représentants de notre Réserve locale s’y rendront pour prendre la parole.
Sébastien Giguère, le coordonnateur scientifique de l’ASTROLab du parc national du Mont-Mégantic, reconnait que la Réserve jouit d’une réputation enviable. « D’abord parce que c’est la première, ensuite parce qu’il y a un maillage très grand avec la région et les municipalités. La réputation de la Réserve est aussi à cause du leadership exercé en termes de conversion d’éclairage, de réglementation, de sensibilisation. »
Salt Lake City, É.-U.
Sa présentation lors de la 5e Conférence internationale sur l’éclairage artificiel de nuit portera d’ailleurs sur les liens qu’entretient la Réserve avec la communauté. « Sans l’appui massif de la région, des citoyens, des élus, des professionnels et des commerçants, on n’aurait pas pu la faire [la RICEMM] puis on aurait de la misère à assurer sa pérennité. C’est jamais acquis. On est toujours en train de travailler là-dessus évidemment. »
Deux jours plus tard, le 14 novembre, son collègue Rémi Boucher, coordonnateur scientifique de la RICEMM, présentera l’évolution du ciel étoilé au-dessus de la Réserve. Il s’agira plus précisément d’un bilan des mesures d’évolution de la pollution lumineuse.
Les conclusions sont très satisfaisantes. « La Réserve est en bonne santé », se réjouit M. Boucher. « Ce qui prouve que les mesures mises en place, ça marche. Malgré l’augmentation de la population [environ 9 % sur 10 ans], on réussit à garder un très, très beau ciel au mont Mégantic. »
Pour tous les gouts
Sébastien Giguère trouve intéressant le côté multidisciplinaire de la conférence en sol états-unien. « C’est très intéressant parce qu’il y a des gens de tous les milieux. C’est pas juste des astronomes puis des physiciens qui mesurent le ciel étoilé. Il y a des gens en écologie, des médecins, des urbanistes, des ingénieurs qui vont être là. Ça permet de mettre en lien tous ces gens-là ensemble, puis de mettre en commun les connaissances. »
Cette diversité dans la représentation des disciplines démontre bien l’ampleur qu’a prise la problématique de l’éclairage artificiel extérieur. « Depuis les années 2000, il y a vraiment eu une prise de conscience que les impacts de la pollution lumineuse étaient beaucoup plus larges que la disparition du ciel étoilé. »
« Ça reflète un peu le processus que, nous-mêmes, on a suivi », poursuit M. Giguère. « Au début, l’objectif de la Réserve était de protéger la viabilité scientifique de l’Observatoire. Et ça reste évidemment l’objectif central. Je dis des fois qu’on est passé de protéger l’Observatoire et les étoiles à protéger la nuit de façon plus large. »
Marrakech, Maroc
C’est également le constat que souhaitait partager Rémi Boucher lors des conférences qu’il a prononcées à l’Atelier international sur la pollution lumineuse qui s’est tenu fin octobre à Marrakech. « Des fois, les astronomes ont tendance à penser juste à leur observatoire et à leurs observations. Je voulais agrandir ça comme perspective. »
Le Maroc souhaite instaurer la première réserve de ciel étoilé en Afrique du Nord et celle qui deviendrait la plus grande. À l’heure actuelle, c’est celle du Mont-Mégantic qui est la plus vaste avec un rayon de 50 km.
« Je dirais que la contribution de notre Réserve, c’est de leur donner des outils puis un peu une idée dans quoi ils s’embarquent et de quelle manière ils devraient s’embarquer là-dedans aussi », poursuit M. Boucher. Dans le cadre de ce symposium, la RICEMM était invitée à titre de présentatrice principale et M. Boucher a donné deux conférences.
Autant pour l’événement passé que celui à venir, Sébastien Giguère voit ces occasions d’un bon œil. « Ça va nous permettre d’entretenir notre leadership puis de partager notre expérience autant en termes de mesure qu’en termes sociopolitiques. »
Bien qu’ayant une longueur d’avance dans le domaine, la Réserve ne se contente pas que de livrer son savoir. Elle effectue un échange avec de l’expertise extérieure. « Nous, on va chercher beaucoup de choses quand même », admet M. Giguère. « C’est toujours plaisant de rencontrer des gens sur d’autres projets dans le monde. C’est nourrissant pour nous aussi. »