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Intrigue à la galerie d’art Cookshire-Eaton : Louis-Pierre Bougie et Amélie Lemay-Choquette

Lemay-Choquette

Amélie Lemay-Choquette avec sa peinture, Annabelle, créée avec de la peinture à base de solvant résistant aux UV, sur verre 23 x 24 pouces.

Les deux expositions actuellement à la galerie d’art Cookshire-Eaton nous offre une étude de contrastes.
Dans l’espace au rez-de-chaussée de la galerie, l’œuvre de la jeune Amélie Lemay-Choquette porte l’étendard de la lumière et sa peinture dialogue avec la danse. À l’étage, le travail du chevronné Louis-Pierre Bougie sonde l’obscur et son art dialogue avec la poésie.
Tout d’abord, les toiles de Lemay-Choquette. Lors de ses études à l’Université Concordia il y a une dizaine d’années, l’artiste s’est spécialisée à la fois en danse contemporaine et en peinture. La spontanéité et l’évanescence imprègnent son art. J’imagine sa main danser devant le verre, répétant un mouvement puis appliquant la peinture au zénith du geste, l’incarnant.
Ainsi, chaque tableau capture « l’instant décisif » de l’action dont le célèbre photographe français Henri Cartier-Bresson disait qu’il visait à saisir.
L’exposition de Lemay-Choquette intitulée Interstice, à la fois en français et en anglais, décrit un espace ou un écart entre deux objets ou espaces. « Entre l’ombre et la lumière », dit-elle. « Entre les corps, pendant la pandémie. Entre la pièce et sa projection au mur. Et le travail sur les émotions pour arriver à une libération. »
« J’ai vécu cette expérience avec mon corps, par le mouvement », a-t-elle commenté. « Dans mon nouveau travail, j’ai découvert la matière différemment. J’ai utilisé de la peinture transparente. Dans la lumière, elle devient lumière, comme le reflet sur l’eau. »
En effet, son travail danse entre transparence et couleur. C’est intrigant et brillant, dans tous les sens du terme.
À l’étage, nous retrouvons un tout autre univers, celui de Louis-Pierre Bougie, décédé en janvier 2021 à l’âge de 74 ans. Il était graveur et peintre, considéré comme le plus important graveur québécois de sa génération.
La gravure est une discipline exigeante, et Bougie l’a étudiée 15 ans à Paris. Il a également travaillé et exposé à travers l’Europe et à New York. Son influence a favorisé la visibilité de l’estampe québécoise et il a laissé sa marque dans des livres, dans une myriade d’expositions et dans ses collaborations avec d’autres artistes, notamment à l’Atelier Circulaire de Montréal.
Le contraste entre les deux artistes exposant à Cookshire réside non seulement au niveau de l’âge, mais dans la forme, l’espace, la couleur et l’engagement avec la matière. Il est difficile d’imaginer une démarche plus énergique, néanmoins préméditée que la gravure, où l’on incise littéralement des traits en entaillant la surface. L’œuvre de Bougie s’appuie sur le travail de trois maîtres graveurs fascinants du 19e siècle dotés d’une imagination hors du commun : Félicien Rops, Goya et William Blake.
Plusieurs des œuvres de Bougie sélectionnées pour cette exposition, qui ont été créées entre 2008 et 2018, sont en fait peintes à l’acrylique sur toile, et d’autres sont des sculptures métalliques autoportantes à quatre pattes ressemblant à des totems. Les lignes et les formes robustes des sculptures et des peintures intègrent une végétation luxuriante, des animaux et des êtres imaginaires dans une sombre intrigue. L’imagination de Bougie est en fait peu commune.
L’exposition de Bougie, Vert-de-gris, se termine par trois esquisses au crayon qui dialoguent avec de courts poèmes de Martine Audet. Il les a créées pendant son séjour à l’hôpital et des photolithographies en ont été faites à titre posthume.
Les expositions de Louis-Pierre Bougie et d’Amélie Lemay-Choquette se poursuivent à la Galerie d’art Cookshire-Eaton jusqu’au 9 octobre prochain.

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